par Yves Chemla

La géométrie des variables, les professeurs de mathématiques nous rappellent qu’elle constitue un des départements de la théorie des probabilités, et qu’elle a pour vocation l’application de statistiques. L’analyse de correspondances rapportées à une population donnée rend possible la prédictibilité des attitudes, par le biais d’un ensemble de modalités d’agencement et de comportement de ces variables. Elle permet de traduire par des données quantitatives la variété des qualités. Les spécialistes de la communication politique l’utilisent abondamment pour parvenir, en particulier, à répondre à ces questions : si la richesse d’une population croit en étendue et en quantité d’information, cette population change-t-elle ses comportements politiques ? Quelle variable faut-il actionner pour qu’elle devienne un levier efficace, moteur d’un changement de discours, voire de posture ?
Nous savons pourtant que la réduction de la qualité à la quantité correspond aussi à une vision quantitative du monde, et qu’elle est sans doute elle-même aussi une imposture : la qualité est un événement, comme le rappelait Robert Pirsig(1), c’est même l’événement particulier qui permet de prendre conscience du surgissement du sujet et de l’objet. La qualité est irréductible à un résultat . Mais il n’en demeure pas moins que les agences de communication agissent sur nos propres discours, participant à l’élaboration d’un produit de synthèse, un ersatz de pensée politique, qui a pour finalité la réduction de la citoyenneté à la consommation.